Huit projets IEA retenus à CNRS Sciences informatiques

International Informatique

​​Retrouvez les lauréates et lauréats de la campagne des International Emerging Actions 2024, appel de la Direction Europe et international du CNRS destiné à favoriser à l'exploration de nouveaux champs de recherche et de partenariats à l'international.

Les International Emerging Actions (IEA) sont des projets « PI-to-PI » financés par le CNRS dont la finalité est l’exploration de nouveaux champs de recherche et de nouveaux partenariats à l’international par des missions de courte durée, l’organisation de réunions de travail permettant d'initier des travaux de recherche autour d’un projet scientifique partagé. Ces actions ont une durée de 2 ans. Les IEA s’adressent aux personnels exerçant une activité de recherche dans une unité du CNRS.

Cette année, CNRS Sciences informatiques félicite 8 porteurs et porteuses projets :

AT-AI – Les algorithmes et l’identifiabilité des décompositions tensorielles avancées

Les décompositions tensorielles, qui expriment des tableaux multidimensionnels (tenseurs) à l'aide de représentations compactes de faible rang, constituent l'un des outils les plus importants pour la compression et le traitement des données à haute dimension.

Les techniques de rang faible et les techniques tensorielles sont utilisées avec succès dans un large éventail d'applications. Elles sont particulièrement pertinentes pour les méthodes d'IA fonctionnant avec des tableaux multidimensionnels de données et de poids de modèles, afin de réduire les besoins en calcul et en mémoire de ces méthodes (IA frugale).

Ce projet explore les décompositions tensorielles avancées (couplées, multicouches, etc.) et les approximations apparaissant dans le contexte de plusieurs applications, telles que la compression de réseaux neuronaux, la détection d'anomalies dans l'imagerie hyperspectrale et l'analyse de données d'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf). L'objectif principal est de concevoir des algorithmes et d'étudier la propriété clé d'identifiabilité de ces modèles, qui est cruciale pour les applications. Le projet est dirigé par Konstantin Usevich, chargé de recherche CNRS au CRAN (CNRS/Université de Lorraine) et vise à développer une collaboration entre l'équipe SiMul du CRAN et des experts sur ce sujet du Département d'informatique de la KU Leuven (Belgique).

DecipHear - Déchiffrer les représentations auditives profondes et non linéaires avec la méthode des bulles et de corrélation inverse

L'intelligence artificielle (IA) est omniprésente en biologie. De l’aide à la prise de décision clinique à la modélisation des mécanismes biologiques, ces systèmes sont capables de prédictions complexes échappant à l’intuition humaine. De fait, ils sont souvent qualifiés de « boîtes noires » en raison de la difficulté à en comprendre la logique. Cette opacité suscite souvent une grande perplexité et l’interprétabilité de l’IA par ses utilisateurs est ainsi devenue une priorité pour répondre aux défis sécuritaires, éthiques et scientifiques engendrés par ces méthodes.

« Prédire n'est pas expliquer », disait René Thom. C'est précisément l'objectif de DecipHear : développer des outils d'interprétabilité pour décrypter les stratégies non linéaires des réseaux neuronaux simulant l'activité cérébrale auditive. À l'interface des sciences informatiques et des neurosciences, le projet est porté par Étienne Thoret, chargé de recherche CNRS à l’Institut de neurosciences de la Timone (INT - CNRS/Aix-Marseille Université) en collaboration avec Frédéric Gosselin, professeur à l’Université de Montréal.

L’idée ? Utiliser deux méthodes issues des neurosciences cognitives pour sonder les systèmes d’IA afin de tenter d'identifier les informations essentielles aux prédictions et d'éclairer ainsi les représentations sonores encodées, tant dans les réseaux artificiels que dans le cerveau humain. Les avancées espérées favoriseront en outres la création de nouvelles méthodes d'explicabilité, applicables à d'autres problématiques en IA.

FMPDP - Méthodes formelles pour des programmes probabilistes et pour la confidentialité différentielle

La vérification formelle de programmes s’appuie sur la logique pour démontrer mathématiquement que les programmes satisfont certaines propriétés. Ce projet porte sur la vérification de programmes probabilistes, c’est-à-dire utilisant des primitives probabilistes comme par exemple des tirages aléatoires. Ce paradigme de programmation est couramment utilisé dans des domaines comme la cryptographie ou la protection de la vie privée. Or dans le cadre déterministe (non probabiliste) deux approches classiques de vérification formelle de programmes déterministes pouvant être automatisées sont d’une part les approches algébriques, pour les programmes écrits dans des langages impératifs, et d’autre part les systèmes de types, pour les langages fonctionnels. Le projet explorera des extensions de ces deux catégories de méthodes aux programmes probabilistes, ainsi que leurs applications à la confidentialité différentielle, une méthode de protection de la vie privée basée sur une perturbation du calcul par l’ajout de bruit probabiliste.

Ce projet est porté par Patrick Baillot, directeur de recherche CNRS au Centre de recherche en informatique, signal et automatique de Lille (CRIStAL – CNRS/Centrale Lille/Université de Lille) s’appuiera sur les compétences complémentaires, d’une part en logique et sémantique des langages de programmation des participants du laboratoire CRIStAL et d’autre part en vérification et en confidentialité différentielle des participants de l’Université de Boston.

GATEAU – L’intelligence artificielle générative pour la gestion des réseaux informatiques

Les réseaux informatiques modernes s'appuient de plus en plus sur des techniques d'apprentissage automatique (ML) pour une large gamme de tâches de gestion, allant de la sécurité à l'optimisation des performances. Bien que les traces réseau étiquetées soient essentielles pour ces tâches, une difficulté majeure dans l'entraînement des modèles ML orientés réseau réside dans la rareté des jeux de données réseau étiquetés. Si les traces réseau synthétiques peuvent enrichir les jeux de données existants, les techniques actuelles ne produisent généralement que des statistiques de flux agrégées ou des attributs de paquets limités. Ces approches s'avèrent insuffisantes lorsque l'entraînement des modèles nécessite des caractéristiques uniquement disponibles dans les traces de paquets complètes. Cette limitation se manifeste à la fois par une fidélité statistique insuffisante aux traces réelles et par des performances sous-optimales sur les tâches ML lors de l'augmentation des données.

Ce projet explore l'application de l'IA générative pour répondre aux défis émergents dans les systèmes informatiques, en particulier dans les réseaux informatiques. Plus précisément, le projet étudiera le développement de modèles d'intelligence artificielle générative pour créer des traces de trafic réseau synthétiques à haute résolution. La recherche sera menée dans le cadre d'une collaboration franco-américaine entre Francesco Bronzino, maître de conférences à l’École normale supérieure de Lyon et membre Laboratoire de l'informatique du parallélisme (LIP – CNRS/ENS de Lyon/Université Claude Bernard) et Nick Feamster, professeur Neubauer à l’Université de Chicago.

HoDReCo - Homomorphismes et coloration de graphes

Les graphes (ou réseaux) sont des modèles mathématiques répandus pour représenter des données interdépendantes de toutes sortes. L'homomorphisme d'un graphe G permet généralement de l'intégrer dans un autre graphe H (plus petit ou plus grand que G) tout en préservant certaines propriétés importantes. Le terme Col(G,H) désigne l'espace de tous les homomorphismes de G vers H, et il est intéressant de noter que Col(G,H) est également considéré comme un graphe. 

HoDReCo est un projet porté par Moritz Mühlenthaler, maître de conférences à l’Institut Polytechnique de Grenoble et membre du laboratoire Sciences pour la conception, l'optimisation et la production de Grenoble (G-SCOP – CNRS/Université de Grenoble). Son objectif principal est d'étudier les différents aspects structurels et algorithmiques de Col(G,H), avec un accent particulier sur le sujet émergent de la reconfiguration et le sujet classique de la coloration. Ces études des aspects structurels et algorithmiques de Col(G,H) trouvent leurs applications dans les CSP (Constraint satisfaction problem), la physique statistique, les jeux combinatoires, l'ordonnancement, les réseaux sans fil et les bases de données de graphes. Ses recherches devraient avoir un impact à la fois sur l'élaboration de la théorie et sur la résolution de problèmes dans les domaines d'intérêt.

MOTIF - Génération et compréhension de mouvements humains pour l’assistance au geste

Motion cOmprehensive predicTIon Framework 

Prédire les gestes humains est essentiel pour rendre les robots d’assistance sûrs et efficaces. Le contrôle optimal inverse vise à identifier, à partir de mouvements observés, les fonctions de coût que les humains cherchent à minimiser (énergie, confort, etc.).

Le projet de recherche est porté par Vincent Bonnet du Laboratoire d'analyse et d'architecture des systèmes (LAAS-CNRS), maître de conférences à l’Université de Toulouse et membre de l’International research laboratory IPAL, Dana Kulic, professeure en robotique et directrice du centre de robotique de l’Université Monash à Melbourne (Australie) et deux doctorants. L’objectif principal de cette collaboration est de comparer les méthodes de chaque équipe pour ensuite développer de nouveaux algorithmes d’optimisation inverse permettant d’identifier des fonctions de coût biomécaniques à partir de gestes humains, afin d’alimenter un modèle de connaissance, ou modèle de fondation du mouvement humain, capable de générer un grand nombre de trajectoires optimales proches de celles observées chez l’humain. À l’inverse de la littérature basé sur des LLM (Large Langage Model) leur approche permet de garder un degré d’explicabilité dans la prédiction du mouvement humain. Ce modèle pourra ensuite être utilisé pour simuler ou prédire les mouvements humains dans des contextes variés, avec pour objectif final d’adapter le comportement du robot à celui de l’humain de manière naturelle et anticipative.

SOHOS - Systèmes de contrôle hybrides sensibles à la saturation et à l'optimisation

Le Laboratoire d'analyse et d'architecture des systèmes (LAAS-CNRS) et l'Université de Séville s'associent pour explorer de nouvelles frontières dans l'ingénierie du contrôle. Grâce à cette collaboration, les scientifiques des deux institutions combineront leurs forces dans le domaine des systèmes dynamiques hybrides, un moyen puissant de modéliser des comportements complexes qui mélangent des changements en douceur et des sauts soudains. Cette expertise partagée ouvre la voie à des réseaux électriques plus fiables, à des manœuvres de satellites efficaces et à des systèmes énergétiques plus intelligents, exactement le type de résilience nécessaire pour éviter des perturbations telles que la panne d'électricité en Espagne au printemps 2025.

Des doctorantes, doctorants, jeunes chercheurs et jeunes chercheuses seront également très impliqués, acquérant une expérience pratique dans des projets de pointe et apprenant des expertes et experts français et espagnols. Ce projet dirigé par Luca Zaccarian, directeur de recherche CNRS au LAAS-CNRS, est une véritable opportunité de partager les connaissances, dont l'objectif est de construire non seulement de meilleures technologies, mais aussi la prochaine génération d'ingénieures et ingénieurs prêts à relever de grands défis.

TWIN4NET – Concevoir un jumeau numérique pour les réseaux sans-fil

Les jumeaux numériques connaissent un essor sans précédent dans le cadre de l’Industrie 4.0. TWIN4NET ambitionne de transposer cette approche innovante aux réseaux sans fil, tels que la 5G, le Wi-Fi et l’Internet des objets. Véritable levier d’optimisation, le jumeau numérique permet d’adapter en continu l’infrastructure réseau à des conditions variables tout en la rendant plus économe en énergie et en ressources radio. En ajustant les ressources au plus près des besoins réels, il devient possible de limiter le surdimensionnement des infrastructures. Le jumeau numérique permet de simuler et tester virtuellement différentes configurations sur des modèles, évitant ainsi toute perturbation du fonctionnement opérationnel des réseaux.

Ce projet porté par Fabrice Theoleyre, directeur de recherche CNRS au Laboratoire des sciences de l'ingénieur, de l'informatique et de l'imagerie (ICube – CNRS/Université de Strasbourg), consolidera la collaboration entre ses deux partenaires. L’équipe Réseaux du laboratoire ICube apportera son expertise en conception et expérimentation de réseaux sans fil (5G et Internet des objets), tandis que l’Université nationale de Pusan (Corée du Sud) contribuera grâce à son savoir-faire reconnu en Intelligence artificielle et en optimisation appliquées aux réseaux.

Contact

Patrick Baillot
Délégué scientifique Section 2
Vincent Bonnet
Maître de conférences à l'Université de Toulouse et membre du LAAS
Francesco Bronzino
Maître de conférences à l'École normale supérieure de Lyon et membre du LIP
Moritz Mühlenthaler
Maître de conférences à l'Institut Polytechnique de Grenoble et membre du G-SCOP
Fabrice Theoleyre
Directeur de recherche CNRS au laboratoire ICube
Étienne Thoret
Chargé de recherche CNRS à l'INT
Konstantin Usevich
Chargé de recherche CNRS au CRAN
Luca Zaccarian
Directeur de recherche CNRS au LAAS-CNRS