Mise en place d’un dispositif de mentorat

Dans le cadre de la politique parité de CNRS Sciences informatiques, les référentes et référents égalité de ses laboratoires se sont réunis en ateliers pour travailler sur différents sujets, avec une restitution collective lors de la journée des référentes et référents du 17 mars 2022. Un des ateliers a porté sur la mise en place d’un dispositif de mentorat au laboratoire. Les conclusions de cet atelier sont présentées ici pour une utilisation par tous les laboratoires concernés. Cette page a pour objectif de fournir un guide synthétique de la mise en place du mentorat dans les laboratoires de CNRS Sciences informatiques.

Le mentorat dans les laboratoires de CNRS Sciences informatiques

Le mentorat consiste à la mise en place d’un accompagnement individuel d’une ou un collègue, la mentorée ou le mentoré, par une ou un autre, la ou le mentor. Cet accompagnement est mis en place dans un cadre défini à l’avance autour d’objectifs et questionnements professionnels identifiés. Il est généralement prévu sur un horizon de temps fini, par exemple pour 1 an (reconductible), sans relation hiérarchique. La ou le mentor s’implique en garantissant bienveillance et discrétion. La mentorée ou le mentoré s’implique en respectant l’engagement bénévole de la ou du mentor.
 
Ces dernières années, il est apparu que le mentorat s’avérait un outil bienvenu pour créer un environnement plus favorable et une meilleure projection professionnelle de la mentorée ou du mentoré. Il peut par exemple s’agir de mieux accompagner et conseiller les collègues « junior », d’autant plus lorsqu’ils ou elles sont en position potentiellement vulnérable.
 
Basée sur plusieurs expériences récentes de dispositifs de mentorat et les réflexions issues d'un groupe de travail composé de référentes et référents parité-égalité des laboratoires de CNRS Sciences informatiques, cette note de synthèse rassemble quelques pistes et bonnes pratiques en vue de la mise en place d’une action de mentorat. Il ne s’agit en aucun cas d’un cadre rigide mais d’un petit guide pratique décliné en étapes typiques, assorti de documents complémentaires tels que des exemples de chartes ou mails utiles. Il sera important d’adapter le dispositif à l’environnement et aux caractéristiques locales.

1. Qui peut mettre en place un mentorat au laboratoire ?

Si l’initiative de proposer la mise en place d’un mentorat peut initialement émaner d’une seule personne, il sera sain et utile d’impliquer au minimum quelques collègues dans la réflexion. Le mentorat peut aborder des sujets sensibles, et sa mise en œuvre elle-même est un sujet sensible. Il va nécessiter la prise d’informations personnelles, la mise en relation privilégiée de deux collègues, une communication sur l’action entreprise, etc. Une gestion collégiale (par un groupe de « pilotes » de l’action mentorat) de ces différents aspects permettra d’éviter de nombreux écueils.

Une interaction avec la direction du laboratoire et du conseil de laboratoire sur les grands enseignements issus des retours des personnes impliquées dans le dispositif est aussi bénéfique.

2. Pour quel public ?

L’une des premières étapes est de choisir pour qui le mentorat est mis en place. Il s’adressera généralement aux plus jeunes collègues, parfois uniquement aux femmes. Ainsi, le mentorat mis en place par Femmes & Sciences dans plusieurs universités s’adresse exclusivement aux doctorantes ; le programme « Talentueuses » de l’Institut national du service public. Dans de nombreux cas, le mentorat s’adresse plus largement à l’ensemble des membres des laboratoires qui l’ont mis en place, avec si nécessaire une priorité aux femmes et aux jeunes. Il peut être pertinent d’intégrer les personnels ingénieurs, techniciens et administratifs dans le dispositif, même si les problématiques à traiter sont assez différentes.

3. Définir le périmètre

Le périmètre le plus naturel est l’ensemble du laboratoire lui-même. Afin d’atteindre une masse critique, les plus petites unités peuvent envisager de s’associer avec des unités voisines, par exemple au sein d’une UFR ou d’une école doctorale. Il semble important d’avoir cette masse critique pour plusieurs raisons : d’une part, pour permettre d’avoir suffisamment de distance entre les mentors et leurs mentorées et mentorés ; d’autre part, pour disposer d’un groupe de mentors le plus varié possible. Une action de mentorat impliquant un nombre assez grand de personnes permet d’avoir un peu de flexibilité dans l’association des mentors aux mentorées et mentorés. Il permet aussi des échanges et partages d’expérience entre mentors.

4. Initier l’action de mentorat

Le lancement du mentorat peut être annoncé de façon plus ou moins officielle. Il est préférable que le lancement d’une campagne de mentorat soit soutenu par différents acteurs clés du laboratoire. Une annonce préliminaire en conseil de laboratoire permet de prévenir l’ensemble des membres de la mise en place du mentorat. Une annonce par mail permet de toucher plus largement les membres du laboratoire. Là encore, l’appui de la direction du laboratoire permet de rendre l’annonce plus officielle et donc de susciter un intérêt plus large. L’inscription peut aussi être sollicitée auprès de quelques personnes ciblées, par exemple les doctorantes et doctorants de 1ère année ou les collègues nouvellement recrutées et recrutés du côté des mentorées et mentorés, et les collègues ayant déjà une certaine expérience du côté des mentors potentiels.

5. Associer mentors et mentorées/mentorés

L’appariement entre mentors et mentorées ou mentorés peut être réalisé de plusieurs façons. Une possibilité est de réunir une commission de quelques personnes (dont, idéalement, des représentantes et représentants des services de ressources humaines) chargée d’associer un mentor à chaque mentorée et mentoré. Cela nécessite qu’à l’inscription, les personnes souhaitant être mentorées et celles souhaitant être mentors indiquent leurs préférences. Il s’agira d’identifier par exemple les sujets qu’elles souhaitent aborder, la proximité thématique souhaitée au sein de la paire, ou si le genre de la personne mentor est importante. On prendra garde à respecter autant que possible les règles édictées par le règlement général sur la protection des données (RGPD), sans en faire un obstacle rédhibitoire.

Une fois ces informations recueillies, la commission pourra par exemple proposer directement une ou un mentor à chaque personne mentorée ou laisser un peu de liberté en proposant deux noms de mentors au choix. L’appariement peut aussi être fait de façon plus informelle, via une réunion de « speed-dating » où les mentors et les mentorées ou mentorés discutent ensemble jusqu’à trouver la personne qui leur convient.

6. (In)former les mentors

Il est fortement recommandé d’organiser une formation préalable pour les nouveaux mentors. Cette formation pourra être proposée en amont du dispositif. C’est l’occasion d’« officialiser » le début du mentorat. Il s’agit surtout d’informer les mentors sur les limites de leur rôle. En particulier, il est important que les mentors comprennent qu’il ne leur revient pas de chercher à résoudre eux-mêmes des problèmes personnels qu’ils pourraient détecter (problèmes de santé mentale ou physique, conflits entre personnes, etc.). Le mentorat reste un accompagnement professionnel et ne vise pas à se substituer aux dispositifs d’accompagnement personnel, aux dispositifs de gestion des conflits, et aux dispositifs de détection et d’accompagnement des situations de harcèlement. Il est important d’indiquer aux mentors les contacts et relais adaptés qu’ils peuvent ensuite indiquer à leurs mentorées et mentorés en cas de problèmes sortant du cadre du mentorat.

7. Premier contact, première rencontre entre mentors et mentorées/mentorés

La prise de contact entre mentors et mentorées ou mentorés et l’organisation de leur première réunion peut prendre différentes formes. La mise en relation peut avoir lieu de façon autonome (en s’assurant, après quelques semaines, que le contact a bien été établi), ou via les responsables du dispositif. On pourra par exemple demander aux mentors d’inviter la personne mentorée pour une première rencontre ; on évitera ainsi de mettre la personne mentorée en position de « demandeur ». Il est important que chaque paire mentor-mentoré établisse, lors des premières discussions, le cadre du mentorat, et les sujets qu’elle souhaite aborder ensemble ; des objectifs peuvent éventuellement être définis. Cela peut être formalisé par la signature d’une charte. Le degré de confidentialité des échanges sera convenu à l’occasion de cet implication mutuelle.

8. Assurer le suivi du dispositif de mentorat

Un suivi assez léger est généralement suffisant. Chaque paire mentor-mentoré s’organise comme elle l’entend. On rappellera simplement aux participantes et participants qu’il leur est possible de contacter les responsables du mentorat à tout moment en cas de besoin, toujours dans le respect d’une certaine confidentialité.

Il peut être intéressant d’assurer un suivi périodique (par exemple tous les 6 mois). Ce suivi peut prendre différentes formes. Une réunion entre mentors permettra le partage de leur expérience du mentorat tout en veillant bien sûr à la stricte confidentialité des échanges entre mentors et mentorées ou mentorés. Un document partagé en ligne, où chacune et chacun peut (anonymement ou pas) exprimer son ressenti sur le mentorat est une alternative, de même que des rencontres individuelles avec les responsables du mentorat.

9. Fin du mentorat

Il est important de limiter dans le temps la durée « normale » du mentorat, par exemple à un an, éventuellement renouvelable à volonté. Cela évite d’installer une routine dont on ne saurait plus trop comment sortir. Bien entendu, les mentorées et mentorés pourront se réinscrire, éventuellement avec les mêmes mentors, ou avec d’autres, sans avoir à se justifier.

10. Pérenniser le dispositif

Afin d’évaluer et de faire évoluer le dispositif, il est important de recueillir les impressions des participantes et participants, mentors comme mentorées et mentorés. On pourra le faire de façon un peu plus formelle en fin de « contrat », par exemple via un formulaire en ligne. Cela permet habituellement de récolter quelques petites phrases qui peuvent être réutilisées pour faire la publicité du dispositif les années suivantes. Cela permet également d’obtenir quelques suggestions d’amélioration pour les années suivantes.

Autrices et auteurs

Ce texte a été rédigé par Pierre Chainais, délégué scientifique de CNRS Sciences informatiques, et Nicolas Markey, directeur de recherche CNRS à l’Institut de recherche en informatique et systèmes aléatoires (IRISA - CNRS/Université de Rennes) et responsable de la cellule parité de l'IRISA, avec la contribution des membres de l'atelier "Mentorat" de la journée des référentes et référents parité de CNRS Sciences informatiques en mars 2022 :

  • Catherine Barbe-Zoopis, TIMC
  • Simon Bliudze, Inria Lille – CRIStAL
  • Marthe Bonamy, LaBRI
  • Marie Chabert, IRIT
  • Christine Chevallereau, LS2N
  • Céline Coutrix, LIG
  • Marie-Lise Flottes, LIRMM
  • Cécile Murat, LAMSADE
  • Anastasia Paparrizou, CRIL
  • Brigitte Vallée, GREYC et IRIF

Il est recommandé d'échanger sur le sujet avec les directrices et directeurs d'unité et avec les référentes et référents du laboratoire lors de la mise en place de ce mentorat.